Un retour en enfer Prisonnière de l’Etat Islamique et mise au ban de la société

Du 15 avril au 30 mai, Ayny Aynak, média d’expression des femmes syriennes, lance une campagne visant a sensibiliser le public sur la délicate situation des femmes syriennes à leur sortie de prison et leurs difficultés à se réinsérer dans la société. Syrie Newes, en partenariat avec l’ASML/Syria, s’associe à cette campagne en publiant les témoignages de ces femmes.

Visuel du témoignage de Oum Mohammad

Prisonnière de l’Etat Islamique et mise au ban de la société

Ayni Aynak—Ayah Mohammad

Il n’y eut pas de fin heureuse pour les citoyens de Raqqa après que l’État Islamique vaincu ait retiré ses forces : les effets de l’occupation se font encore sentir et leur ombre plane toujours sur la population. Les plus affectées sont les femmes qui ont enduré toutes formes d’abus et de violences pendant ces jours obscurs, allant de l’arrestation jusqu’au meurtre.

Oum Mohammad de Raqqa fut arrêtée arbitrairement et passa deux mois d’horreur dans les geôles de l’EI. À sa libération, elle fut emmurée dans une autre prison, celle de la stigmatisation sociale dont elle fut victime au quotidien. Les voisins ont commencé à l’éviter elle et ses enfants, et ce, au mépris de l’enfer qu’elle avait vécu aux mains de ses geôliers et des châtiments dont avait souffert son mari.

Témoignant auprès de Ayny Aynak, Oum Mohammad raconte : « J’ai beaucoup souffert de l’occupation de notre ville par l’EI. Ils m’ont mise à la rue avec mes enfants, ils ont assassiné mon mari et nous ont tous déplacés. Ils ont utilisé toutes sortes de stratagèmes pour nous humilier et nous dominer, pour nous imposer leur autorité : il nous dictaient notre tenue vestimentaire et ont décrété que la voix même des femmes était obscène et qu’elle ne devait donc pas être entendue. »

 »J’ai été abusée physiquement, émotionnellement et psychologiquement », dit-elle en racontant son emprisonnement. » J’étais affamée, épuisée et malade. À la fin de chaque journée, ils m’injuriaient alors que j’étais au sol, la faim me tordant le ventre. Et tout ce que je pouvais faire était de prier Dieu pour qu’il m’aide et me donne la patience ».

Quand prit fin son incarcération, Oum Mohammad ne trouva personne pour l’accueillir ou la réconforter. Au contraire, elle réalisa alors que ses souffrances ne faisaient que commencer. Des larmes dans la voix, elle confie:  »J’ai commencé à remarquer la façon dont les gens me regardaient et cela n’a pas cessé après le retrait des troupes de l’EI. Ils m’envisageaient comme une femme immorale à la réputation souillée, comme si j’avais fait quelque chose de mal et que je devais ‘baisser les yeux de honte’, comme ils disent ici. Je n’avais pourtant rien fait de mal. J’étais comme tant d’autres, coupable de rien, d’aucun péché. »

 »J’ai été mise à l’écart » elle continue,  »par la société, par mes proches et par mes voisins. Il me considéraient tous comme une prostituée”.

Ce terrible traitement ne s’est pas limité au simple ostracisme, ni aux insultes : il s’est étendu à tous les aspects de sa vie quotidienne et à celle de ses enfants.  »Ils m’ont tellement conspuée qu’ils ont interdit à leurs enfants de jouer avec les miens » explique Oum Mohammad.  » Une fois, mon fils jouait avec le fils d’un voisin dans la cour de la maison  », se souvient-elle, « et quand sa mère l’a vu, elle s’est ruée sur les deux garçons en hurlant, puis elle a commencé à crier sur moi, en s’époumonant: « Cette femme était une prisonnière de l’Etat Islamique, personne ne devrait lui parler, ni à ses enfants ! ».

Lien vers l’article sur Survivors or not yet (en Arabe) :

https://www.survivorsornotyet.com/post/%D9%86%D8%A7%D8%AC%D9%8A%D8%A7%D8%AA-%D8%A3%D9%85-%D9%84%D9%8A%D8%B3-%D8%A8%D8%B9%D8%AF

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