Elle s’appelle Reem, elle n’osait pas écrire ou témoigner. En avril 2021, elle secouait ce mur de la peur pour nous envoyer un témoignage plein d’espoir. Aujourd’hui, elle nous a écrit pour appeler à l’aide, seule, sans espoir à 25 ans.
Je suis en guerre dans mon propre pays. Reem, janvier 2022.
(Témoignage recueilli en anglais et traduit pour Syrie News)
Je suis née dans un pays qui considère comme fondamental la relation que nous entretenons nos proches : la famille et les amis sont plus importants que la richesse et la propriété.
Si vous venez dans notre pays, vous ne trouverez pas de gratte-ciels, non ! Vous trouverez une famille déjeunant ensemble, qui vous invitera spontanément avec amour pour partager ce moment chaleureux.
Oui, nous avons connu 10 ans de guerre désormais, mais ça n’a jamais changé nos principes, et à travers cette guerre nous avons tenus tant que nos amis et familles étaient saines et sauves. Dans mon cas, j’avais une amie depuis l’âge de 13 ans. Nous sommes devenues les meilleures amies dès notre première rencontre, nos familles devenant elles-aussi amies. Comme nous vivions dans deux quartiers différents, j’allais m’abriter chez elle quand les combats s’approchaient de chez moi, et elle faisait de même.
Aujourd’hui, j’ai 25 ans, mais j’ai déjà connu tout ce que la guerre comporte : la faim, les conditions sanitaires déplorables, le froid, l’enlèvement, les tirs, les bombardements… Mais à la fin de la journée, nous arrivions quand-même à en rire. Nous nous disions que la faim nous aiderait à avoir des corps de mannequins, ou bien que le froid nous entraînerait à survivre au Pôle Nord quand nous irions voir ses magnifiques lumières célestes. En traversant cette guerre, nous nous disions que ce n’est pas la pire chose qui pourrait nous arriver. Au moins, nous avions nos amies et notre famille, pas vrai ?
Pourtant, la réponse à cette question a récemment changé : Non ! Nos amis et nos familles partent. Ma meilleure amie part elle aussi. Elle est partie car elle n’en pouvait plus. Elle n’a pas tort, tout comme les millions d’autres personnes qui ont fait ce choix. Elle m’a dit mot pour mot « je veux partir juste pour avoir un bain chaud et ne plus avoir froid« .
Désormais, je me sens plus en guerre que jamais. Il n’y a personne ici qui peut témoigner que nous avons droit à seulement 30 mn d’électricité par jour ou que je n’ai plus personne avec qui partager un repas.
N’importe qui aurait ce sentiment de défaite quand il ou elle est laissée seule. Ils nous ont tout pris, mais nous avions réussi à tenir fermement. Maintenant, ils nous ont pris nos principes et le noyau de notre existence.
Maintenant, je demande de l’aide car je suis en guerre dans mon propre pays…
Texte original en anglais.
was born in a place that considers the relationship as a fundamental thing; family and friends are more important than money and property. If you come to our country you won’t find a skyscraper, but you’ll find a family sitting together for dinner inviting you with love to have a good time with them.
Yes we have had 10 years of war now, but that never changed our principles, and through it all we’ve been holding on as long as our family and friends are alright. In my case, I had this friend since I was about 13. We became best friends in no time and we were the reason that our families became friends. We lived in different neighborhoods, so when the shooting is in our neighborhood I go to her house and vice versa. I’m 25 now, and I can tell you we have been through every detail of the war: hunger, bad health conditions, cold, kidnapping, shooting, bombing. And at the end of the day, we always laughed at it, she and I saying hunger would give us a model body or cold would train us to survive if we travel to the north pole to see the amazing lights in the sky. Through all that, you feel as if it isn’t the worst thing in life; I mean at least you have for your friends and family, right?
The answer to that question changed recently: no, you don’t have your friends and family anymore; they left. She left because she could not take it here anymore. She’s not wrong to. So did millions of people. She left because – and I quote word for word – “I want to leave just to have a nice hot bath without freezing”.
Now I feel I am at war more than ever. There’s no one here to tell that we had electricity for only 30 minutes today, and no one to share a meal with. One feels weak and defeated only when he or she is left alone. They took away everything but still we stood firm and survived, but then now they took away our principles, our core.
Now I ask for help because I am at war in my country ..