Dans le traitement médiatique de la situation en Syrie, les articles qui évoquent le quotidien des populations civiles sont suffisamment rares pour que, lorsqu’il en est publié un, cela soit souligné. Par ailleurs, lorsque ces articles sont écrits depuis les zones contrôlées par le Régime de Bachar Al-Assad, leurs auteurs omettent relativement souvent de souligner les conditions de surveillance dans lesquels ils ont réalisé leur travail et les limites de facto posées aux propos et retours qu’ils peuvent effectuer.
Le 15 mars 2018, l’envoyé spécial de La Croix à Damas, François d’Alançon, a publié un article intitulé « A Damas, la fatigue des années de guerre » qui a retenu l’attention. Outre sa qualité, il a également l’honnêteté de préciser que « Ce reportage a été réalisé accompagné d’un représentant du ministère syrien de l’information ».
L’article est en accès libre dans les conditions fixées par le journal :
Vous trouverez ici un résumé et quelques considérations personnelles qui n’engagent que le rédacteur de ces lignes et non les administrateurs du site qui m’ont fait l’amabilité de me proposer d’y contribuer.
Dans sa première partie, l’envoyé spécial de La Croix écrit finement que les vols des avions de chasses et salves d’artilleries tirées depuis le Mont Quassioun qui ciblent la Ghouta rythment le quotidien des Damascènes. Damas dont les habitants du quartiers de Bab Touma subissent en retour les tirs de mortiers effectués depuis les zones rebelles. La distorsion dans le rapport de forces, et donc les impacts en termes de destructions et de victimes, entre la puissance militaire de Bachar Al-Assad et de forces rebelles est ici mise en évidence pour qui sait lire entre les lignes.
L’article évoque ensuite le semblant de normalité soigneusement entretenu à Damas où le discours officiel stigmatise le rôle néfaste des pays du Golfe et de la Turquie. Ceux-ci sont présentés comme des soutiens du terrorisme appuyés par les USA et l’Europe. Dans un Damas relativement préservé au quotidien, c’est l’usure de 7 années de guerre et la lassitude qui semblent dominer. En toile de fond le Régime, tenu à bout de bras pas ses sponsors, apparait comme n’ayant pour seul objectif que sa survie à n’importe quel prix.
Le reportage montre ensuite que la pauvreté écrase la très grande majorité de la population Syrienne avec un taux qui atteint les 80 %. L’aide humanitaire est donc devenue capitale pour la survie au quotidien. De nombreux habitants des zones tenues par le Régime développent des stratégies alternatives pour survivre et augmenter leurs sources de revenus en cumulant plusieurs emplois. Les femmes et les enfants sont mis particulièrement à contribution. En effet nombre d’hommes fuient pour échapper à la conscription obligatoire, quand ils ne s’engagent pas dans des milices qui rémunèrent mieux que l’Armée. Ils agissent là plus pour subvenir aux besoins de leurs familles que par conviction réelle.
Comme dans toute zone de conflit, une économie de guerre qui bénéficie à une petite classe de mafieux et de profiteurs s’est construite. En Syrie a émergé depuis 7 ans une nouvelle classe de riches qui écarte progressivement l’ancienne bourgeoisie. Elle prospère sur tous les trafics possibles et imaginables dans un pays exsangue et gravite autour du pouvoir auquel elle ne sera pas sans demander des comptes à l’avenir.
Pour finir, l’article aborde le très délicat sujet d’une hypothétique, voire impossible, réconciliation lorsqu’enfin les armes se seront tues.
(Crédit illustration : œuvre de Miream Salameh, artiste syrienne réfugiée en Australie avec son aimable autorisation, qu’elle en soit remerciée)
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