Du 15 avril au 30 mai, Ayny Aynak, média d’expression des femmes syriennes, lance une campagne visant a sensibiliser le public sur la délicate situation des femmes syriennes à leur sortie de prison et leurs difficultés à se réinsérer dans la société. Syrie Newes, en partenariat avec l’ASML/Syria, s’associe à cette campagne en publiant lés témoignages de ces femmes.
Survivantes de la détention… Torturées en prison et par la société
Aya Serhan
Hibr – 20/04/19
“N’est-il pas suffisant que je t’aie épousée alors que tu as été détenue ?” Salma raconte que les disputes avec son mari se terminaient souvent sur cette cruelle remarque. Elle a été arrêtée à l’âge de 19 ans par les forces de sécurité militaire, le 5 mars 2013, pendant la période d’examen de la faculté de Droit de Damas.
Au sujet de son arrestation, elle détaille : “j’ai reçu un coup de téléphone à 9h30 de la part du directeur des affaires étudiantes qui m’informait que ma demande de place au dortoir avait été acceptée. Il a insisté pour que je vienne à son bureau pour régler des formalités ‘de routine’ et, à mon arrivée, j’étais attendue par les forces de sécurité. Ils m’ont menottée, m’ont bandé les yeux et m’ont embarquée”.
“Je ne savais pas ce qu’il se passait jusqu’à ce qu’ils m’ôtent le bandeau des yeux et me jettent dans une pièce souterraine. C’est ainsi qu’a commencé mon calvaire”.
“J’ai été transférée au département de sécurité 291 de Damas, où la torture et l’injustice étaient pratiquées à un niveau encore plus haut. Dans une cellule de 4x4m peuplée de plus de 30 détenues, j’ai été témoin des méthodes de torture les plus indescriptibles. Parmi les captives se trouvait le Dr. Faten Rajab (33 ans) originaire de Douma dans la campagne de Damas. Déjà titulaire d’un doctorat en physique nucléaire, elle travaillait sur une nouvelle thèse dans cette même discipline au sein d’une université française quand elle fut arrêtée le 26 décembre 2011”.
“Tous les jours, ils jetaient Faten sur le sol de la cellule alors qu’elle saignait de la bouche, du nez et des yeux. Cette torture sauvage a perduré jusqu’à sa mort dans l’un des cachots des services secrets syriens. Une autre des détenues était une journaliste turque qui a perdu la tête suite aux viols collectifs qu’elle subissait de manière répétée.”
“Selon de nombreux rapports, l’arrestation des femmes était une méthode couramment utilisée pour insulter, humilier et faire pression sur les factions opposées ainsi que pour obtenir des informations. La plupart des détenues ont admis sous la pression les fausses accusations qui étaient retenues contre elles”.
Dans son interview au journal Hibr, Salma poursuit : “j’ai été relâchée après une année de détention. J’ai rassemblé le peu qu’il me restait de force physique et mentale et j’ai quitté ma petite prison pour être accueillie dans une plus grande. J’ai souffert du mépris des gens vis-à-vis de mon statut d’ancienne détenue et j’ai fait face à de nombreuses accusations voilées et à de nombreuses questions blessantes”.
“Quand j’ai réalisé qu’il ne me serait plus possible de réintégrer la société, que je me suis sentie ostracisée, j’ai demandé l’asile en Turquie avec ma famille. J’y ai rencontré mon mari qui m’a promis de me faire oublier ma petite et ma grande prison. Cependant, nos disputes se terminaient souvent par cette cruelle remarque : “N’est-il pas suffisant que je t’ai épousée alors que tu as été détenue ?”
J’ai finalement choisi de conserver le peu de dignité qu’il me restait et je suis partie avec mon enfant.
Je travaille maintenant pour subvenir aux besoins de mon enfant et de ma famille (ma mère, mes frères et soeurs), après que mes tentatives de reprendre mes études ont échouées. En effet, personne n’ose m’apporter mes diplômes dont j’ai besoin pour m’inscrire à l’université parce que je suis une ancienne détenue”.
Lien vers l’article sur le site de Survivors or not yet (en arabe) :
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