Alors que la chape de plomb sécuritaire se referme peu à peu sur la Syrie, des voix s’élèvent un peu partout dans le monde pour affirmer que « Assad a gagné la guerre ». Ces relais de propagande n’ont d’autre objet de que normaliser un régime responsable principal de la destruction de son pays et contribuent à enterrer ainsi les aspirations de celles et ceux qui se sont soulevés en mars 2011 pour réclamer Liberté, Dignité et Justice.
De partout dans les monde, s’élèvent également de trop rares voix qui viennent relayer et amplifier celle des syriens et syriennes qui résistent encore. A Syrie News, nous avons souhaité publier de temps à autres certains de ces témoignages.
Ici, un texte publié le 29 mars 2019 par Vince Remos, militant belge des droits humains, sur sa page facebook que nous relayons avec son aimable autorisation
Ecrit par Vince Remos le 28 mars 2019.
Ce soir, à la demande d’une amie, j’ai raconté à une jeune lycéenne dans le cadre d’un travail scolaire la révolution syrienne telle que je l’ai perçue avec mes yeux et ma subjectivité tout au long de ces huit longues années. En alignant les mots, je me suis brusquement rendu compte combien cette tragédie était forte, puissante, importante, essentielle.
Je lui expliquais donc que je n’avais aucune prétention à la moindre « expertise » sur ce conflit que je n’étais rien de plus qu’un simple militant des droits humains qui avait été touché par les printemps arabes et s’était simplement senti solidaire de l’élan vers cette aspiration à la liberté.
Comment j’avais vu les démocraties pourtant si fières de leur supériorité morale lâchement abandonner ce peuple laissant ce dernier subir les pires atrocités. Comment des dictatures cyniques étaient venues à la rescousse d’un régime aussi sadique que moribond pour satisfaire de sordides et puérils calculs stratégiques. Comment une organisation fanatique abusivement appelée état islamique avait profité du chaos pour y installer sa propre dictature. Comment la communauté internationale était finalement intervenu militairement en Syrie mais uniquement pour combattre ce groupe précis tout en épargnant le régime syriens et ses alliés. Comment on avait choisi pour cela de s’allier à une milice kurde « marxiste léniniste » rescapée de la guerre froide et tolérée par le régime Assad comme supplétif. Comment l’armée turque n’était intervenue auprès des syrien que pour contrôler sa frontière et contenir cette milice..Tout cela laissant une Syrie exsangue et démolie sur laquelle quelques parties échappent encore à la dictature du régime syrien.
« Assad ou on brûle le pays » le régime a pour cela tenu parole…
Je lui racontai aussi comment malgré l’atroce répression subie, ce peuple continuait pourtant à lutter et combien son désir de liberté continuait pourtant à vivre. Comment la révolution syrienne s’était dans cette tragédie muée en une idée qui dépasse de loin ce pays pour impliquer toute l’humanité. Comment nous étions aujourd’hui devenus tous les témoins et les comptables des terribles questions qui se posent devant nos yeux surinformés ;
Comment a-t-on pu et peut on continuer à détourner les yeux devant le massacre d’un peuple dont le seul crime fut de prendre au mot l’idéal de liberté et de démocratie qui fonde notre modernité à tous ?. Comment a-t-on pu laisser le récit imbécile et mensonger d’une « guerre civile » entre un régime fasciste et des terroristes fanatiques se substituer à la vérité ? Comment de soi-disant experts qui ne sont que de tristes propagandistes stipendiés par les pires dictateurs de la planète peuvent-ils sans réaction ou presque asséner leurs mensonges dans tout les cercles de la gauche européenne ? Comment les soi-disant défenseurs acharnés du peuple palestinien qui n’ont pas de mots assez durs pour fustiger les « sionistes » feignent de ne pas voir les milliers de palestiniens qui meurent sous la torture dans les geôles du régime Assad pour s’être simplement solidarisés avec leur frères syriens ?
Toutes ces questions sont désormais les nôtres et la honte retombera sur tout ceux qui auront en ces jours refusé aux syriens leur droit à la liberté et à la démocratie.en détournant le regard voire en leur crachant au visage.. Car le régime syrien peut sembler victorieux pour l’instant mais il ne durera pas, ses soutiens tôt ou tard devront l’abandonner et un jour il devra rendre des comptes devant la justice peut-être, devant l’histoire sûrement.
Qui sauve un homme sauve toute l’humanité dit le proverbe mais une humanité qui refuse de sauver les syriens des griffes d’un des pires criminels contre l’humanité peut-elle encore prétendre rester humaine ?
Ces questions d’une terrible évidence je les ai vu briller dans les yeux émus de ma jeune interlocutrice…d’une lueur triste mais pas désespérée, d’une lueur qui s’appelle l’espoir !