Depuis le début de la Révolution syrienne, en mars 2011, la liste ne fait que s’allonger des massacres délibérés de civils commis par les différentes parties en présence. Selon le Syrian Network for Human Rights, ce sont 226 247 civils qui ont été tués en 9 ans. Le Régime Assad est l’acteur qui a commis le plus grand nombre de morts civiles avec 199 854 cas documentés.
Le « pic d’activité », si l’on peux dire, se situe en décembre 2012 avec 66 077 morts cumulés dont 99,8 % attribués aux partisans d’Assad.
Entre 2012 et mi-juillet 2013, une commission d’enquête de l’ONU a identifié 9 massacres visant spécifiquement des civils dont 8 ont été jugés comme commis par les forces loyalistes. A cette période précise, la stratégie du Régime est de confessionnaliser le conflit. Il organise des massacres ciblés dans des communautés pour exacerber tensions et ressentiments.
Le massacre de Houla, commis le 25 mai 2012, s’inscrit dans cette liste d’exactions. Il fit 108 victimes dont 34 femmes et 49 enfants.
Sur son profil Facebook, Firas Kontar a partagé le courageux témoignage de Fawziah Khalaf (photo) rescapée de ce qu’il qualifie, à juste titre, de boucherie.
Lors de ce massacre, quatre des enfants de Fawziah et son mari Samir Hussein Abdel Razzaq sont morts. Qu’ils reposent en eux et les autres victimes de cet acte monstrueux.
Nous reproduisons ici ce témoignage essentiel pour ne pas oublier.
Je me suis offerte pour épargner ma fille.
Publié par Firas Kontar le 3 juin 2020.
« J’ai déchiré mes vêtements et je me suis offerte pour épargner ma fille, deux hommes m’ont violée devant mon mari.
Ils ont tué 20 membres de notre famille, mon mari et quatre de mes filles (Sawsan 21 ans, Houda 18 ans Nada 12 et la plus jeune avait dix ans), ils ont tué la femme de mon fils enceinte de sept mois et son petit bébé Samir qui portait le nom de son grand-père. Ils ont tué ma sœur, ma belle-sœur et ses deux enfants, mon cousin et ses quatre enfants, l’épouse de mon beau-frère et sa fille.
Ils nous ont rassemblé dans une pièce à l’écart près des escaliers du toit et ont ouvert le feu, puis quatre d’entre eux ont attaqué les survivants aux couteaux en nous battant, en nous insultant en donnant des coups de pied et en violant les femmes et les jeunes filles. C’est à ce moment-là que deux d’entre eux m’ont violé puis ils ont violé ma fille de 21 ans Sawsan devant mon mari qui criait et pleurait avant de lui tirer une balle dans la tête. Nous étions 27 personnes dans cette maison seul sept ont survécu, ils inspectaient les corps des enfants et des femmes et exécutaient au couteau ceux encore en vie.
Ils nous ont sadiquement torturés et prenaient plaisir à agresser les petites filles. Ils les écrasaient avec leurs pieds, Ils leurs tiraient les cheveux au point de les arracher et déchiraient leurs vêtements. Les cris des femmes et des enfants retentissaient de partout et du sang giclait sur les murs.
Une balle perdue d’un des soldats a tué le soldat qui violait ma fille Sawsan, pour se venger un de ses compagnons a égorgé ma petite Sawsan devant mes yeux en l’insultant et en insultant Dieu.
Je me souviens et je n’oublierai jamais comment mes enfants s’accrochaient à moi et criaient à l’aide «Maman», mais j’étais impuissante alors que leur père venait d’être tué.
Nous avons quitté le village en empruntant une petite route rocailleuse, des jeunes de l’armée syrienne libre nous ont trouvé, ils nous ont portés et nous ont exfiltré jusqu’au village de Kafer Laha. J’étais avec mes deux filles Hiba et Rasha, ma nièce Zahra, ma cousine Fatima et deux autres survivantes, nous n’étions que 7 rescapées sur les 27 membres de la famille.
Je ne souhaite à personne ce que j’ai vécu et je ne pensais pas les humains capables d’une telle haine confessionnelle et d’une telle barbarie. Je raconterais mon histoire jusqu’à ce que justice soit rendue à mes enfants et jusqu’à ma mort je commémorerais ce triste anniversaire. »
Fawziah Khalaf.
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